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Emmanuel Macron, « prince de l’indécision » et « prestidigitateur de lui-même », dans un roman

Quand deux écrivains se croisent dans un salon littéraire, c’est une question qu’ils se posent : Emmanuel Macron ferait-il un bon personnage de roman ? Depuis la dissolution de l’Assemblée nationale, que personne au sein de l’ex-majorité n’a été capable d’expliquer, l’analyse des intentions présidentielles s’est, en partie, déplacée sur le terrain psychologique, source d’inspiration nouvelle pour les romanciers, fascinés quand la réalité semble soudain dépasser la fiction. Un personnage de roman (Julliard), s’appelait justement le livre que Philippe Besson avait consacré en 2017 à Emmanuel Macron et à sa première campagne présidentielle. Il ne croyait pas si bien dire…
Tout juste sorti en librairie, Les Derniers Jours du Parti socialiste (Seuil, 480 pages, 23 euros), d’Aurélien Bellanger, roman à clé sur le mouvement du Printemps républicain, créé en 2016 pour promouvoir la laïcité, dresse le portrait d’un « ministre banquier » élu à l’Elysée. « Le Chanoine » ressemble trait pour trait à l’actuel locataire de l’Elysée : « visage fin », « grand nez », « favoris anachroniques », soit « l’ultime apparition, presque jusqu’à la caricature, de la figure littéraire de l’ambitieux », écrit Bellanger, qui le voit en réincarnation du Julien Sorel de Stendhal.
Il le décrit ainsi : un homme « ambigu », « émancipé de toutes les appartenances », « flott[ant] entre la droite et la gauche » et qui, « par coquetterie mitterrandienne et pour marquer sa différence de stature avec ses deux prédécesseurs avait prôné une présidence jupitérienne ». « La France ne se gouverne ni à droite ni à gauche, elle se gouverne selon des lois immuables héritées de l’Ancien Régime », théorise-t-il page 459.
Le romancier raconte ces « séances d’hypnose viriliste » au cours desquelles « le Chanoine » s’emploie à séduire ses « proies », les yeux plantés dans les leurs. « Ces courtes cérémonies charismatiques sont moins destinées à nous faire croire qu’il est un personnage d’exception qu’à s’en convaincre lui-même, comme s’il ne pouvait vivre que dans la certitude de son propre génie. Cette croyance, qu’il emporte avec lui après chaque poignée de main, est son vrai capital politique – celui d’un prestidigitateur de lui-même. »
Dans un chapitre au titre magistral – « Le Mois de la mélancolie » –, ce président romancé connaît le même passage à vide qu’Emmanuel Macron au lendemain de sa réélection, épisode étrange et suspendu qui fut notamment raconté par le journaliste politique Ludovic Vigogne dans un livre, Les Sans Jours (Bouquins, 2023). A peine réélu pour un second mandat, le président- « Chanoine » est saisi d’une soudaine apathie, comme s’il n’avait plus envie de rien. Une « acédie », liée au fait qu’il ne pourra pas se représenter dans cinq ans, diagnostique l’auteur, soit « la noire mélancolie des moines à qui la grâce faisait souvent défaut ».
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